Georges de la Ferté

Georges Marie Joseph Gérard THIBAULT DE LA CARTE DE LA FERTÉ SÉNECTAIRE est né le jeudi 4 décembre 1913¹ dans le VIIIᵉ arrondissement de Paris et est décédé le dimanche 29 mars 1992 à Blois.²
Élève de l'École de Saint-Cyr, Georges de la Ferté s'est particulièrement illustré dans la Résistance en Saône-et-Loire sous le nom de "Férent", parfois écrit "Ferrand". Il était, en effet, responsable des Forces françaises de l'Intérieur (FFI) pour le département après l'arrestation du commandant Bellecombe, dit Beaurivage, par la Gestapo le dimanche 23 janvier 1944 à 8h00.³
Il mourut sous la torture au fort de Montluc.
Son action lui valut d'être cité à l'ordre de l'armée :
« Officier d’élite, véritable preux plein de feu et d’enthousiasme. Par sa foi ardente dans la victoire, son audace devenue légendaire, a galvanisé la Résistance en Saône-et-Loire dont il est devenu le chef après la mort du Commandant de Bellecombe. Par son ascendant inégalable, son prestige indiscuté, a attiré à la Résistance, groupé et organisé les éléments de huit bataillons d’élite qui, dans des prouesses demeurant ineffaçables, infligèrent des pertes sensibles à l’ennemi, disloquèrent ses lignes de communication, et par de véritables victoires ont successivement délivré toutes les villes du département. A pris en particulier une part active à la libération de Chalon et d’Autun où il a conduit l’assaut des positions ennemies, entraînant ses troupes dans un élan magnifique par son intrépidité souriante, tuant plusieurs ennemis de sa main et ramenant plus de 30 prisonniers. »
Carrière militaire

Étant né en 1913, Georges de la Ferté prit part à tous les événements militaires qui ont marqué la France à partir de la fin des années 1930. Le parcours de celui que la Résistance appellera "Férent" est particulièrement remarquable par la diversité des conflits auxquels il a pris part, mais aussi par le nombre de citations et de décorations reçues par l'officier. Bien que d'autres missions lui aient été confiées, les grands moments à citer sont les suivants : campagne de France - Syrie - Résistance et Libération - Indochine - Algérie.
Campagne de France
Le jeune la Ferté est nommé sous-lieutenant le 1er octobre 1936 par décret du 11 septembre 1936 puis lieutenant par décret du 8 septembre 1938. Il part aux armées le 27 août 1939, avant que la France ne déclare la guerre à l'Allemagne, le 3 septembre 1939. Il est affecté au 1er régiment de chasseurs à cheval, qui deviendra ensuite le régiment lourd de la 4e B.C. à compter du 1er août 1940. C'est dans ce régiment, au cours de la campagne de France, que l'officier reçoit sa première citation :
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE – portant nomination au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur
Décret du 5.9.1940 (J.O. du 14.9.1940). Rang du 29.6.40
"Le 15 mai 1940, une unité d’infanterie ayant été surprise dans un village par un détachement motorisé ennemi, a contre-attaqué à la tête d’un groupe de cavalerie, obligeant l’adversaire à se retirer du village, a libéré des prisonniers et détruit une chenillette ennemie."
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de guerre 1939-45 avec palme.
Celui que l'on appelle pas encore Férent sera affecté au 5e dragon à compter du 1er septembre 1940.
Syrie
La Ferté débarque à Alep le 29 juin 1941, où il rejoint le 2e groupe du 2e RMS et est placé au 5e escadron le 1er juillet 1941. Rapatrié du Levant avec son unité, il embarque à Beyrouth le 16 août 1941 pour retourner en France à partir du 23 août 1941. Durant l'opération Exporter, il prend part aux combats dans le but de repousser l'invasion britannique au Levant, et obtient ainsi sa deuxième citation :
CITATION À L'ORDRE DE LA DIVISION - O.G. N° 186 du 20.7.1941 du Général Commandant les Troupes du Territoire du Liban (Homologuée J.O. du 5.12.1941).
"Officier possédant d'exceptionnelles qualités d'allant et de courage, le 7 juillet 1941 devant AIN BAAL, ayant pris depuis la veille le commandement d'un peloton de l'Escadron, a réussi par une contre-attaque menée avec un brio remarquable à reprendre la côte 858 qui venait d’être perdue".
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de guerre 1939/45 avec Étoile d'argent.
Résistance et Libération
Affecté à Mâcon à partir du 1er septembre 1941, il prend officiellement le commandement des FFI de Saône-et-Loire à partir du 15 novembre 1943. La tâche est rude et le climat très opaque sur fond de rivalité entre mouvements, de jalousies d'avant-guerre purgées dans les troubles de la Libération, de détournement de parachutages ayant enrichi personnellement certains chefs de maquis. La situation est si délicate que Férent fut même approché par un envoyé du chef de la milice de Lyon, qui recherchait un accord avec les FFI d'origine AS pour lutter ensemble contre les faux maquisards qui se livrent au pillage sur le territoire :
"Il me proposa alors un accord A.S.-milice dans le but de purger le pays des faux résistants dont le seul but était le pillage. Cet accord fut refusé parce qu'il était inadmissible qu'on put songer un instant à lier deux organisations diamétralement opposées dans leurs procédés et dans leur idéal."5



Carte de combattant et fausses cartes d'identité de Férent
A un moment, la situation devient critique, car la tête du commandant de la Ferté est mise à prix par certains mouvements de résistance autonomes et communistes. Lansdowne, lord écossais parachuté dans le Charolais, voit la situation et intervient directement auprès de De Gaulle et de Moulin pour qu'elle cesse. La situation est prise très au sérieux par le commandant Férent, qui a en tête l'exécution de Claudius Alabéatrix, responsable départemental du MUR, et de son ami Gilbert Nourissat, survenues sur la commune de Saint-Bonnet-de-Joux. Dans le petit village, le notaire échappe de peu à l'exécution sommaire et M le marquis de Laguiche, qui est déjà en déportation, est présent sur les listes des personnes "à supprimer" qui circulent dans certains maquis.
Ce n'est qu'à partir de la libération de la ville de Chalon-sur-Saône que la situation se dévoilera clairement. Alors que des camarades de promotions, remontés avec De Lattre, venaient le saluer, Férent entend dans son dos cette phrase : "C'est foutu, l'armée est avec lui !", signifiant qu'il n'était plus possible de le supprimer sans en payer le prix.
La nature des relations qui animèrent les mouvements AS, IS et FTP est développée un peu plus loin dans cette présentation. Les combats menés par la Ferté lui valent quatre autres citations :
CITATION À L'ORDRE DU CORPS D'ARMÉE - O.G. N° 7 du 22.9.1944 approuvé par N.D.S. N° 24177/I/CH du 1.10.1944 du Général, Cdt, la 1ère Armée Française.
"Le 8.9.1944 devant AUTUN, s'est porté en tête des premiers éléments de l'attaque. Débouché avec eux sur la place des Marbres. Rejeté par l'ennemi, a porté ses compagnies en avant pour tenter de s'emparer coûte que coûte de son objectif. A atteint le lendemain matin le centre de la ville se tenant toujours au premier rang de ses groupes F.F.I., leur donnant constamment le plus bel exemple d'allant et de courage souriant."
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de guerre 1939/45 avec Étoile de Vermeil.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - portant promotion au grade d'Officier de la Légion d'Honneur - Décret du 1.10.1945 (J.O. du 18.10.1945).
"Officier d'élite à l'âme ardente, au courage indomptable, d'un dynamisme hors ligne, véritable symbole de la Résistance ennemie. S'est distingué dans l'organisation de la lutte en Saône et Loire, réussissant à grouper sous ses ordres plus de 2.000 hommes, assurant avec ses unités la libération de MACON, CHALONS SUR SAONE, CLUNY et AUTUN. Organisateur du 5° Dragons reconstitué, s'est dépensé sans compter, entraînant son unité dans les cols des Alpes et assurant la prise des ouvrages fortifiés fortement tenus et âprement défendus par l'ennemi dans la vallée de l'UBAYETTE. Assure les 21 et 22 avril 1945 la conquête de 4 villages et de 6 ouvrages, capturant 150 prisonniers".
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de guerre 1939/45 avec palme.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision N° 1135 du 15.9.1945 (J.O. du 18.10.1945).
"Magnifique officier de cavalerie tenant des plus belles traditions de l'Armée. Après s'être particulièrement distingué en 1940, a apporté dans la Résistance l'ardeur et l'enthousiasme de sa jeunesse. Dès le débarquement, a réussi à remettre sur pied avec les éléments du maquis le 5° Dragons. Les 22 et 23 avril, au cours des opérations en UBAYETTE, en tant que Commandant du détachement qui comprenait deux de ses Escadrons chargés de dégager la vallée de l'UBAYETTE et de conquérir les ouvrages de SAINT-OURS, a, par son activité personnelle, ses habiles dispositions, réussi malgré un feu meurtrier et le danger des mines à remplir sa mission, infligeant des pertes sévères à l'ennemi et lui capturant de nombreux prisonniers".
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de guerre 1939/45 avec Palme.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision N° 308 du 20.8.1946 (J.O. du 3.9.1946)
"Officier d'élite, véritable symbole de la résistance. A pris la relève du Commandant de BELLECOMBE assassiné par la Gestapo, dans l'organisation de la lutte en Saône et Loire. Groupant sous ses ordres plus de 2.000 hommes, a assuré la libération de MACON, CHALON, CLUNY et AUTUN. Organisateur du 5° Dragons reconstitué, s'est dépensé sans compter, entraînant son unité dans les cols des Alpes et assurant la prise des ouvrages fortifiés et âprement défendus par l'ennemi, de la vallée de l'UBAYETTE. A assuré ensuite la conquête de quatre villages et de 6 ouvrages et la capture de 150 prisonniers le 22.4.1945."
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de Guerre 1939/45 avec Palme.
Indochine
Après une période de missions consacrées à l'occupation des territoires de l'ancien Reich, la Ferté débarque à Saïgon le 11 août 1950. Il est affecté au 2e régiment de spahis marocains à compter du 12 août 1950 et prend les fonctions du commandant de sous-secteur de Vinh-Long pour un peu moins d'un an. Après diverses mises à dispositions, il rentre en métropole le 21 septembre 1952. Son séjour en Indochine vaut à l'officier quatre nouvelles citations :
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision Ministérielle N° 21 du 7.6.1951 (J.O. du 13.6.1951)
"Officier supérieur de tout premier plan. Commande le sous-secteur de Vinh-Long depuis son arrivée en Extrême-Orient. A pu montrer grâce à l’orientation donnée à son renseignement, de nombreuses opérations de sous-secteur et des embuscades journalières très fructueuses. Participant à toutes les sorties, a rendu par son activité incessante, la vie dure aux rebelles, leur séjour impossible et leur passage très difficile dans la province de VINH-LONG.
S'est particulièrement distingué à la tête d'un bataillon de marche lors des 10 et 11 mars 1951 à l’opération "PAMPLEMOUSSE" où ses commandos reçurent sans faiblir dès le début de la matinée le choc de formations régulières rebelles, les contenant jusqu'à la nuit et permettant ainsi au Commandant du Groupement d’infliger une sévère défaite aux rebelles. Les 23 et 24 mars, à l’opération SAPOTILLE, après avoir bloqué une très violente attaque rebelle, les refoula, puis la nuit en complète déroute, leur capturant une mitrailleuse lourde de D.C.A. Après avoir anéanti toute l’équipe de pièce et 5 fusils, s’assurant ainsi une part déterminante dans les succès de l’opération".
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de guerre des T.O.E. avec Palme.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision Ministérielle N° 2512 du 21.11.1951 (J.O. du 16.2.1952)
"Chef d’escadrons hardi et manœuvrier. Au cours des différentes opérations qui se succédèrent sans interruption dans la province de NAM DINH du 5 au 27 août 1951, a, grâce aux habiles dispositions prises, infligé à l’adversaire des pertes sévères se montant à 21 tués, plus de 200 prisonniers et récupéré 1 F.M., 10 fusils, 2 P.A., 1 mortier.
S'est particulièrement distingué à la tête de son bataillon, le 26 août 1951 et le 5 septembre, lors de l’opération qui visait à la réduction des poches V.M. de KIEN XUONG et de THAI BINH (Thai Binh) en réduisant vigoureusement les fortes résistances rebelles et en réalisant dans des conditions très difficiles une interception des plus efficaces qui coûtait à l’adversaire de nombreux prisonniers".
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de guerre des T.O.E. avec Palme.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision Ministérielle N° 43 du 15.9.1952 (J.O. du 21.9.1952)
"Officier supérieur de classe exceptionnelle qui vient encore une fois de se distinguer à la tête de son bataillon au cours des opérations "PORTO-BOLO - TURCO-TANGO" menées entre le 14 et le 30 avril 1952 dans la région du canal des RAPIDES (Nord Vietnam).
Par des manœuvres rapides, précises, conduites avec allant et une rare intelligence, s’est emparé d’une trentaine de villages fortifiés et tenus. A obtenu au cours de ces combats des résultats particulièrement payants, mettant hors de combat plus de 150 rebelles, récupérant 30 armes et ne subissant dans son bataillon que des pertes minimes".
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de guerre des T.O.E. avec Palme.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision N° 45 du 22.9.1952 (J.O. du 27.9.1952)
BATAILLON DE MARCHE N°1 1er RÉGIMENT DE CHASSEURS
"Constaté une unité pleine d’allant et de cohésion, manœuvrière et courageuse. A toujours rempli ses missions avec succès et à la plus grande satisfaction du Commandement. Toujours remis en ligne plusieurs fois au printemps 1951 dans le delta tonkinois, lors des opérations "CHINCHILLA" et "MEDUSE" a subi le baptême du feu avec le plus grand calme et a contribué efficacement au succès des opérations. À NINH BINH le 31 mai 1951, a opposé une résistance farouche résistance à des forces rebelles très supérieures en nombre, permettant ainsi aux renforts d’arriver et de gagner la bataille de DAY. A subi des pertes importantes au cours de cette opération difficile et à la suite d'assauts répétés, allant jusqu’au corps à corps.
Sous les ordres du Chef d’Escadrons THIBAULT de la CARTE de la FERTÉ SÉNECTÈRE, a pris part successivement aux opérations de pacification du delta tonkinois de juillet 1951 à avril 1952. S’est distingué en juillet 1951 dans le nettoyage de VUBAN et du faux canal de PHULY, détruisant une compagnie de rebelles et récupérant un armement important.
À l’automne 1951, a pris une part active aux opérations "IMPROMPTU 1" et "IMPROMPTU 2", et en assainissant cette région a permis l’implantation des postes. De février 1952 à avril 1952, a participé efficacement aux opérations de nettoyage du delta tonkinois "CRACHIN - OURAGAN - AMPHIBIE - MERCURE". A toujours rempli sa mission malgré les difficultés et a infligé à l’ennemi des pertes sérieuses.
A récupéré un armement et un matériel important. En particulier lors de l’opération "MERCURE" dans le THAI-BINH, a contribué pour une large part à la destruction des forces ennemies."
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de guerre des T.O.E. avec palme.
Algérie
Après une nouvelle période de service dans les Forces Françaises en Allemagne (FFA), la Ferté retourne au front à partir de la fin des années 1950. En effet, il débarque à Oran le 14 avril 1959 pour prendre le commandement du 2e régiment de chasseurs d'Afrique (RCA) et du secteur frontalier de Sebdou. Il est promu au grade de colonel le 1er octobre 1960. De retour en métropole le 8 décembre 1961, Férent poursuivit sa carrière militaire en France. Il fut promu général de brigade le 1er février 1967. Quatre nouvelles citations vinrent couronner cette dernière phase de combat.
CITATION À L'ORDRE DU CORPS D'ARMÉE - O.G. N° 1440 du 10.12.1956 du Général, Cdt. Interarmées et Commandant la 10ᵉ Région Militaire.
"Assurant depuis neuf mois le commandement, très difficile, du Sous-Secteur de BELEZMA (Constantinois), a su contenir dans sa zone les entreprises F.L.N. Entraîneur d'hommes et bon chef sur le terrain, a participé à toutes les opérations dans le BELEZMA, en particulier à celle de MESTAOUIA, le 27 août 1956, où il a infligé des pertes sérieuses à l'adversaire. Depuis sa désignation à la tête du Sous-Secteur, a causé aux hors-la-loi des pertes importantes, a fait de nombreux prisonniers et récupéré une forte quantité d’armes".
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de la Valeur Militaire avec Étoile de Vermeil.
CITATION À L'ORDRE DE L'ARMÉE - Décision Ministérielle N° 3 du 3.2.1956 (B.O.D.M.R. du 28.2.1958).
"Officier supérieur de haute valeur morale, tenace et ardent, commandant un sous-secteur opérationnel. Depuis janvier 1956, a mené avec un allant remarquable une lutte acharnée contre les organisations politico-administratives et contre les bandes d'un adversaire farouche, solidement implanté dans un terrain des plus difficiles. A réussi à faire échec à ses organisations, mettant en place un ensemble de nouvelles communes dont le fonctionnement régulier et efficace constitue l'un des beaux succès de la zone des AURÈS du Sud Constantinois et à détruire la plus grande partie des bandes par une activité offensive vigoureuse. S'est particulièrement distingué le 11 février 1957 au douar MOUI (Aurès) et le 8 août 1957 au djebel MARGUEL (Aurès), anéantissant deux bandes, tuant ou capturant 50 rebelles, récupérant 36 armes et un important dépôt de vivres".
Cette citation comporte l’attribution de la Croix de la Valeur Militaire avec palme.
CITATION À L'ORDRE DU CORPS D'ARMÉE - O.G. N° 185 du 21.4.1961 du Général d'Armée, Commandant en Chef les Forces en Algérie.
"Officier supérieur de haute valeur. Commandant le Secteur de SEBDOU et le 2ᵉ Régiment de Chasseurs d’Afrique, a réussi en un an, par des opérations judicieusement conçues et parfaitement exécutées, à infliger aux rebelles de l’intérieur des pertes s’élevant à 92 tués, 139 prisonniers, saisissant deux mitrailleuses, neuf pistolets et un A.N.G.R.C. 9 complet, et mettant hors d’état de nuire 657 rebelles de l’organisation urbaine et rurale.
A également interdit, par une surveillance constante et attentive, un dispositif dynamique et parfaitement rodé, tout franchissement du barrage sur le front de son secteur.
Par son agressivité et sa rapidité d'exécution, a maintenu les débris des bandes rebelles loin des regroupements, tout en assurant, par son sens profond de l'humain, ses décisions sages et fermes, le retour de confiance et du calme dans l'esprit des populations".
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de la Valeur Militaire avec palme.
CITATION À L'ORDRE DU CORPS D'ARMÉE - O.G. N° 464 du 15.10.1961 du Général de Corps d'Armée, Commandant Supérieur des Forces en Algérie.
"A pris le commandement du Secteur d'AFLOU le 29 novembre 1960 alors que l'adversaire, bien que réduit à deux katibas fortement armés, conservait encore de redoutables possibilités offensives.
Insufflant à tous ses subordonnés son exceptionnel allant, son inlassable obstination, traquant l'adversaire sans répit, a réussi à le réduire à des groupes ayant pour principal souci d'échapper à la destruction.
De décembre 1960 à octobre 1961, a mis hors de cause, quatre-vingt-trois combattants, plus de trois cents membres de l'organisation Urbaine et Rurale, leur arrachant cent trente-six armes dont soixante de guerre. Soustrayant ainsi la population à l'emprise rebelle, a fait franchir un pas décisif dans la pacification".
Résistance : relations AS - IS - FTP
Libérer le territoire et assoir le général de Gaulle
La Saône-et-Loire, en raison de sa situation géographique, constituait un carrefour des moyens de communication et de transport. Situé sur l'axe Paris-Lyon et l'axe Ouest-Est, le département était déjà doté d'importantes infrastructures routières et ferroviaires. D'autre part, la géologie du territoire en a fait un lieu d'implantation privilégié pour de puissantes industries sidérurgiques et, par conséquent, d'armement.
Ces paramètres expliquent pourquoi d'importants moyens furent déployés par les réseaux de résistance sur ce territoire. Ainsi, plusieurs réseaux étaient représentés : le réseau allié Intelligence Service (IS) ou Special Operations Executive (SOE), le réseau communiste des Francs-Tireurs et Partisans (FTP), et le réseau gaulliste de l'Armée Secrète (AS). Ce dernier regroupait des éléments militaires de l'armée d'armistice, ainsi que la branche combattante des Mouvements Unis de Résistance (MUR) et de l'Organisation de Résistance de l'Armée (ORA).
Rappelons que les MUR sont nés de la fusion, orchestrée par Jean Moulin, des mouvements résistants non communistes de la zone Sud : Combat, Franc-Tireur et Libération-Sud.
Il apparaît très clairement dans les archives du général de la Ferté que la libération du territoire comportait un double enjeu : chasser l'occupant, bien entendu, mais aussi prendre le contrôle du pouvoir avant les communistes et les Alliés, afin d'asseoir la légitimité du général de Gaulle. La cohabitation entre les différentes forces résistantes a parfois conduit à des ententes, parfois à des désaccords, mais aussi à des confrontations directes et des règlements de compte.
Relations AS - IS : une affaire d'hommes
Les relations avec les alliés IS-SOE représentent pour l'AS une étape essentielle dans la libération du territoire. Le réseau est en effet solidement implanté sur le territoire grâce à de puissants moyens venus de Londres :
"Il y avait, depuis longtemps, dans le département de SAONE-ET-LOIRE, une organisation dont je connaissais l'existence, mais dont je ne connaissais ni l'ampleur, ni les ficelles, ni les détails d'organisation. Beaucoup y étaient affiliés car l'organisation était riche : argent, parachutages d'armement et de matériels divers."
AS et IS parvinrent à regrouper leurs ressources pour mener à bien un certain nombre d'opérations, grâce au commandant Férent. Cependant, pour les militaires de l'ORA, cette entente était difficile à accepter en raison des intérêts divergents de cette organisation :
"Beaucoup, cependant, y répugnaient et, en particulier, le personnel de l'armée en raison de son affiliation et de dépendance de l'étranger."
Brown-Bartholdi dit Tiburce ou Toto
Capitaine anglais, Tiburce était le chef de la mission IS (SOE) pour le secteur de Cluny, Charolles et Saint-Gengoux-le-National. Il était secondé par le capitaine canadien d'Artois, dit Michel, à Charolles, et par Jean Reynier à Saint-Gengoux-le-National.
Des antennes étaient également détachées au nord et au sud de Mâcon, ainsi que dans la région de Chalon-sur-Saône et de Montceau-les-Mines.
Les premiers échanges, en raison des intérêts différents des protagonistes, sont plutôt froids. Cependant, l'intelligence des deux hommes leur permet de trouver un accord pour mutualiser leurs moyens, d'autant que tous deux craignent de laisser le terrain aux communistes :
"Les premières entrevues, avec Tiburce, furent sans résultats. L'anglais voulait, à juste titre, conserver son indépendance et un certain secret. Cependant, sous la pression de quelques-uns de ses sujets, à la veille du débarquement, un plan d'ensemble fut étudié afin d'éviter des superpositions de missions et afin de répartir les moyens."
En outre, Férent reconnaît les qualités indéniables de l'officier anglais :
"Son patron [parlant de Michel], Tiburce, était beaucoup plus pondéré. Ayant fait des séjours en FRANCE, parachuté depuis longtemps, ayant donc suivi toute l’évolution de l’opinion française, adopté dans beaucoup de familles des environs, Tiburce connaissait bien son pays, jugeait les gens à leur juste valeur. Il avait, à sa disposition, un personnel entraîné et dévoué, routinier pour les parachutages et pour l’emploi des explosifs. Il avait eu des démêlés sérieux avec les F.T.P. qui lui avaient barboté du matériel. Il lui répugnait d’avoir à servir en eux un parti politique : « J’arme des combattants contre l’occupant, mais je ne veux pas que mes armes soient l’occasion d’une guerre civile. »
Tiburce, sur ce point, avait le même point de vue que moi, il n’armait non pas tant toutes les bonnes volontés qui désiraient se battre mais, plutôt, tel chef capable de commandement, sachant son métier, capable de l’apprendre à ses hommes et décidé à combattre."
d'Artois dit Michel le Canadien
Second de Tiburce, Michel le Canadien est présenté comme le responsable du camp de Sylla :
"D’une activité débordante, il recrute, organise, arme, agrandit son secteur, propose ses services à tous ; malgré tout, son influence réelle se réduira au fameux camp de SYLLA."
"À ce sujet, je crois qu’il faut signaler le sens d’organisation de Michel. Son camp de SYLLA était très bien tenu, discipliné. Les hommes étaient instruits au grand air, bien armés, habillés au mieux. Son encadrement n’était peut-être pas parfait, mais honorable et courageux. Ce fut lui qui débutera l’installation du réseau téléphonique qui, plus tard, nous rendit tant de services."
Férent reconnaît les qualités de Michel, mais il souligne également son approche parfois trop anglo-saxonne en matière de recrutement et de commandement des hommes. Cette approche, qui impliquait des considérations financières, l’a, selon lui, parfois conduit à être trompé.
"Par ailleurs, Michel était droit, courageux, honnête. Au fond, c’était un bon enfant, mais un enfant terrible qui se plaisait difficilement à une autorité et ne reconnaissait pas toutes les fois ses erreurs."
"Malheureusement, Michel n’était pas toujours psychologue. Il employa souvent des gens en qui il mit sa confiance, et qui l’exploitèrent. Il avait un sens américain de l’argent et choqua beaucoup de monde venu par idéal, avec ses théories sur la valeur de son argent : « Avec mon argent, disait-il, avec un fort accent, j’ai le personnel que je veux, il suffit de le payer, la seule chose dont je dois me méfier, c’est que tout homme que j’achète peut me vendre ». Il avait également le sens militaire de l’homme et il ne se rendait pas compte qu’en temps de guerre, comme celle que nous menions, la valeur morale de l’homme compte autant que sa valeur technique. Pour lui, l’homme était un mercenaire payé, et payé suivant son rendement indépendamment de toute question de sentiment."
Ainsi, Michel aurait également été dépassé lors de l'exécution de certains parachutages.
"Averti des difficultés des distributions précédentes, exaspéré par le prélèvement des parachutages, effectué par Le Don, sur un des terrains avoisinant le véritable terrain, Michel, qui avait demandé le dernier parachutage, décida de le faire dans le plus grand secret et n’avertit personne. Je sais que ce jour-là, il y eut du gaspillage et Michel s'aperçut qu'il n'avait pas toujours placé sa confiance dans un personnel irréprochable."
Relations AS - FTP : le Don
Les relations avec les FTP apparaissent comme les plus difficiles, en particulier avec leur chef. Le secteur de la Saône-et-Loire est tenu par Henri Ritou, qui se fait appeler colonel Le Don, ou encore commandant Roger, bien qu'il ne soit pas officier. Commerçant à Nantua, il a été envoyé par le parti⁴ afin de diriger les maquis d'obédience communiste. Il affirme, en outre, avoir été curé.
La position de Le Don est sans ambiguïté : son combat est avant tout politique.
Je le rencontrai donc aux BROSSES TILLOTS chez Laupêtre. L'entrevue avait été préparée par le bataillon de MONTCEAU-LES-MINES. J'étais accompagné de Mercier (pseudo Benoît) et Griveaud Georges (pseudo François). Le Don était accompagné d'un ami que je sus plus tard être un détenu politique échappé de LA GUICHE.
L’entrevue fut fraîche. Sous couleur de ménager ses hommes, Le Don se refusait à tout engagement prétextant la méfiance. Il partit en grande discussion sur l'avenir du communisme en FRANCE. Il se montra fervent et passionné, bien plus préoccupé de l’évolution de son parti que de l’Allemand qui, cependant, nous occupait. Il me demanda ma situation vis-à-vis de la milice. À ma réponse, lui affirmant que je poursuivrais tout milicien qui entravait mon action, il me répondit : « vous n'y comprenez rien, moi je les poursuis pour leur action politique ».
Bref, j'avais rencontré un chef politique et non un chef de guerre. Toutes ses actions, il le disait lui-même, étaient des actions politiques, politiques dans leur but, politiques par leurs répercussions et leur propagande."
Férent tente d'organiser une action commune avec les IS-SOE. Des rencontres ont lieu, mais face à l'intransigeance idéologique du maquisard, elles restent sans résultat.
"Je le revis souvent, je lui proposai diverses solutions d’accord. Un jour, j'allai le trouver avec le commandant Marquet envoyé par LYON pour unifier l’action F.T.P./A.S.
Roger (Le Don) fut invité à déjeuner à SALORNAY au maquis de MONTCEAU. Michel (S.O.E.) était des nôtres, le déjeuner fut gai. Le Canadien catholique s’étonna fort qu'on pût avoir plusieurs vies et se montra sceptique sur les origines du colonel Roger.
Après le déjeuner, il fut discuté avec Roger et Marquet des bases d'un accord et il y fut renoncé devant l'intransigeance du communiste. Je proposai de faire des secteurs séparés avec des zones séparées dans lesquelles je définirais les missions éventuelles et je proposai les zones de maquis occupées par les F.T.P. :
« Impossible, tout le département est à nous » répondait Roger.
On pouvait diviser le département en secteur... pour des missions communes des troupes F.T.P. et A.S. et mettre à la tête du secteur le chef le plus capable. C’était la solution qui avait présidé à la fusion A.S./O.R.A., A.S./I.S. :
« Impossible, disait Roger, tous les chefs de guerre sont chez vous ».
Je proposai enfin de garder les troupes F.T.P. en réserve, me proposant de les utiliser comme telles, militairement parlant. Elles avaient ainsi l'avantage de conserver leur cantonnement, de conserver leurs chefs, d’avoir leur rayonnement dans tout le département.
« Impossible, répondait Roger, je connais vos idées politiques, vous risqueriez de faire massacrer mes troupes pour vous en débarrasser ».
Pauvre Roger, rappelez-vous AUTUN et vos 100 victimes ou plus, pour rien, faute de chef et contre les ordres."
Un point encore plus sensible est également évoqué par le commandant de la Ferté : l'existence de milices communistes chargées du "nettoyage" politique, sous couvert d'épuration. L'enjeu, pour le Parti, est d'éliminer les notables établis et jugés "réactionnaires" afin de préparer l'implantation de ses relais.
"Je sus, ainsi, que Le Don avait un bataillon étranger pour les plus basses besognes, qu'il attendait la venue du régime communiste avec impatience, le « grand soir » ou la « Saint-Barthélemy » des bourgeois.
« Le dernier train du communisme part, disait-il en septembre 1944 à un de ses fidèles, sautez dans le wagon de queue, sinon il sera trop tard. Ne comprenez-vous pas que la guerre est finie et que, maintenant, commence « ordre communiste » auquel vous vous devez de collaborer »."
Il est permis de dire que cette démarche s'inscrit dans le cadre d'une exécution préméditée des élites locales, quitte à ce que l'ennemi endosse la responsabilité de ces exactions.
En effet, au moment de la Libération, il existe une réelle ambiguïté quant aux auteurs de certaines exécutions. Pour le formuler plus clairement, les archives départementales et judiciaires décrivent des exécutions perpétrées par des individus en tenue civile. Ces personnes sont parfois rapidement – et sans réelle justification – identifiées comme des ennemis déguisés se faisant passer pour des maquisards. Il convient de rappeler que chaque cas doit être analysé indépendamment, car la frontière entre des ennemis se faisant passer pour des maquisards et des maquisards se faisant passer pour des Allemands est parfois très floue.
Les archives manquent pour établir de véritables liens entre les faits et les personnes, d'autant plus que l'échec de l'insurrection communiste a généré, après-guerre, un tabou au moins aussi fort que celui né de la collaboration. Toutefois, Férent évoque un personnage polyglotte au service de Le Don, parlant notamment anglais. Un individu aux mêmes compétences linguistiques apparaît dans d'autres affaires de la même période :
"Lorsque je demandai l'équivalent à Le Don, il me répondit très nettement : « j’aurais bien ce qu'il vous faut, mais s'ils sont militairement sûrs, ils ne le sont pas politiquement ». Il me dépêcha alors un grand diable blond qui se disait alsacien et parlait un bien mauvais français. En réalité, c’était un étranger, probablement un Russe. De toutes façons, c’était un « pur » parlant diverses langues dont l'anglais, et venu en premier lieu pour espionner Tiburce et Michel. "
Claudius Alabéatrix dit Cadix ou Dunoir

Claudius Alabéatrix, dit Cadix ou Dunoir, était le responsable départemental des Mouvements Unis de Résistance (MUR). Il avait pris la succession de Roujoux, qui l'avait désigné comme son dauphin avant de partir pour l'Afrique du Nord (AFN).
Basé à Saint-Bonnet-de-Joux, il a été abattu sur le pas de sa porte par une rafale de mitraillette le 12 août 1944. La proximité des dates et de la méthode d'assassinat laisse présumer que les mêmes auteurs pourraient être responsables de la mort de Claudius Alabéatrix et du Docteur Nourissat.
Le commandant de la Ferté revient avec précision sur Claudius Alabéatrix, et en particulier sur sa mort. Bien que le militaire ne partageât pas ses idées politiques, il manifeste une certaine estime pour le résistant. En outre, les conditions et les raisons de sa disparition étaient représentatives du climat de trouble et des règlements de compte qui avaient cours au moment de la Libération.
En effet, certaines actions de maquisards se confondaient parfois avec des commerces peu scrupuleux, présentés a posteriori comme des faits de résistance.
Le commandant de la Ferté exprime une opinion très tranchée sur le mobile et les auteurs du meurtre :
"Il avait aidé Roujoux dans le camouflage d'un certain nombre de véhicules du 5éme Dragons et des dépôts d’essence du régiment. [...] D'ailleurs toute l’essence du 5ème Dragon fut dilapidée par des mains peu honnêtes auxquelles Alabéatrix l'avait distribuée et, lorsqu’il fut assassiné à la veille de la libération, nul doute que ce fut sur l'ordre d’un de ses dépositaires, craignant qu'on eut un jour à lui demander des comptes."
L'officier insiste encore davantage un peu plus loin dans son récit :
"La résistance lui avait confié plusieurs milliers de litres d’essence provenant du 5ème Dragons dissout, il les avait répartis. Cette essence, je ne la vis jamais, elle avait été dilapidée.
Alabéatrix s’était juré de faire rendre des comptes à la libération. Son assassinat, à la veille de cette libération, ne serait-il pas le fait de dépositaires malhonnêtes ?
De toutes façons, cet assassinat n’a été commis, ni par la milice, ni par les allemands, ni par mon groupement. C’est, à coup sûr, un règlement de compte et j’ai la certitude que l’hypothèse précédente est la bonne dans son fond. Des trafiquants avaient intérêt à ce que la libération ne vit Alabéatrix vivant."
SOURCES
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Carte d'identité de Georges de la Ferté
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https://www.libramemoria.com/defunts/de-la-ferte-senectere-georges/d2c7b23db46b4fef956b1d5a2fdec4b9
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fiche de présentation des archives du général de la Ferté concernant la résistance de Saône-et-Loire
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Un camp d'internement vichyste - Le sanatorium surveillé de La Guiche, Jean-Yves Boursier, 2004
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RAPPORT du Commandant FERENT (Capitaine de la FERTE SENECTERE) au sujet de l'entretien qu'il a eu au début du mois de Juillet 1944 avec M. MARMOL, 25 juillet 1945